L´histoire commence dans le port de Carthagène. C´est toujours une expérience divertissante de chercher un bateau. On a beaucoup aimé le faire aux îles Canaries, ça nous plaisait d´aller chaque jour au port parler aux capitaines. On y trouve toujours des gens spéciaux, de vrais navigateurs, des hors-la-loi qui ont quitté la terre et la société pour rejoindre la mer et son immensité. Il y a aussi là bas quelques révolutionnaires…
Il y a beaucoup d´opportunités de quitter Carthagène pour les iles de San Blas… mais la plupart ne sont possibles que pour ceux qui sont prêts a payer 400 dollars. Des marins du monde entier sont venus ici pour faire de l´argent. A vrai dire, la mer est la seule route possible et praticable pour arriver en Amérique Centrale. Le Cap Darian est une jungle ou seulement les mieux équipés des voyageurs peuvent pénétrer… et il y a aussi toutes ces histoires de guérillas et de kidnapping. Nous avons choisi le chemin le plus sur… et notre étoile a brillé très fort durant ces jours-ci. Nous avons eu le grand honneur de rencontrer deux esprits libres, Ludwig et Roland, d´Allemagne et d´Autriche, deux voyageurs qui partagent quelques-uns de nos idéaux. Roland a voyagé en Amérique pendant cinq ans sur une moto qu´il a fabriqué lui-même. Il est immense - grand de deux mètres - et possède aussi un grand cœur ! Ludwig est un drôle de capitaine, ironique, libre et anarchiste. Il est bénévolement en charge du Stahlratte. Le bateau est incroyable : 40 mètres de long, un véritable char de fer qui a été mis a l´eau pour la première fois en 1907. Pendant plus de 100 ans, il a navigué comme bateau de pêche, il a ensuite abrité une communauté révolutionnaire durant les années 60, pris part aux actions de Greenpeace durant les années 80 puis a finalement été racheté par un groupe d´amoureux de la mer. Aujourd´hui, plus de 150 personnes propriétaires du bateau lui permettent de naviguer sur les mers. Ludwig et Roland sont les deux seules personnes qui s´occupent de son entretien, ils aimeraient continuer à voyager mais ils sont tombés amoureux du Stahlratte !
Ils ont accepté de nous rencontrer à bord et après avoir écouté notre histoire, ils nous ont posé plein de questions pour s´assurer de notre honnêteté… et ont finalement accepté de nous prendre à bord sous deux conditions : trouver plus de touristes pour remplir le bateau et aider pour le nettoyage, et la cuisine ! Deal !
Chaque fois que nous trouvons un bateau, c´est difficile de décrire la sensation, les émotions qui nous étreignent… Ce passage était le dernier obstacle qui nous séparait de la Panaméricaine, la route qui traverse ensuite tout le continent jusqu´en Alaska !
Nous avons passé la dernière semaine à chercher un maximum de gens… ça n´était pas simple car nous étions en pleine basse saison et qu´il y avait beaucoup de compétition, mais nous avons finalement trouvé quelques personnes et le bateau était plein lorsque nous sommes partis. Nous profitons de nos derniers jours dans le centre… en mangeant des pizzas, des pâtes et toutes sortes de délicieux repas préparés par des Italiens, des Allemands, des Français, des Colombiens… Le gérant d´un restaurant de sushis, Edgar, nous a même offert des habits de sa garde robe qu´il utilisait plus ! Nous avons rencontré Marina, l´ange de Carthagène qui prépare des déjeuners végétariens tous les midis dans son restaurant pour des prix très raisonnables. Elle est géniale, un cœur pur qui nous invite tous les jours à manger…
Viens ensuite le temps de quitter la Colombie. Nous n´avons pas vu tellement de ce pays, finalement, mais l´expérience était riche…
Nous grimpons à bord du Stahlratte avec 11 touristes, 3 américains, 2 australiens, 1 allemand, 1 suisse, 2 danoises, 2 anglais, Ludwig, Roland et Luis, un voyageur colombien qui veut traverser du Panama jusqu´en Europe. Dix nationalités différentes mais à bord, tout le monde se sentait ¨citoyen du monde¨.
Nous sommes de nouveau sur l´eau, le ¨rat d´acier¨ traverse les eaux sous un grand soleil. L´atmosphère est super à bord, nous nettoyons, cuisinons, rions, parlons, échangeons et 40 heures plus tard nous arrivons dans le paradis des îles de San Blas, un archipel de 360 îles habitées par les Kunas, des indiens qui vivent selon leurs propres lois. Tous les villages sont situés sur les îles, au milieu de l´eau turquoise. Un véritable paradis ou nous avons eu la chance de rester deux jours et trois nuits. L´eau est douce, transparente, nous plongeons dans les coraux, mangeons sur des îles désertes ou il n´y a que du sable blanc et quelques cocotiers. Nous ne pouvons malheureusement pas les manger, les Kunas sont très strictes, et tout a un prix… surtout ici, un dollar par noix de coco, un dollar par photo… et il semble que ce soit le même prix pour un sourire. Nous le comprenons, ils ont tenté de sauver leur culture durant des siècles. Aujourd´hui, ils sont 50 000 Kunas, et le conseil vient juste d´interdire l´alcool dans les villes pour éviter que les hommes ne deviennent fous. Dans beaucoup d´endroit sur la planète, et même les plus reculées, un nombre incroyable de gens souffrent des ravages de l´alcool.
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Ludwig arrange le voyage en barque jusqu´ à la terme ferme… le chauffeur s´énerve quand nous lui disons que nous ne pouvons pas payer, apparemment, il y a eu un malentendu mais finalement tout s´arrange et nous pouvons commencer à faire du stop en direction de Panama City, située à peu près à 100 kilomètres de là. Rien de plus simple, sans attendre nous trouvons un véhicule qui nous emmène jusqu'à la frontière du territoire Kuna et là une autre voiture se pointe et nous voilà sur la route de la capitale. Pas le temps d'apprécier la forêt alentours, nous entrons très vite dans la banlieue sud de la ville. De nouveau en plein coeur du Capitalisme à la puissance dix. La ville est une folie, un trafic très lourd, des larges panneaux publicitaires tous les 5 mètres qui polluent la vue...au loin, de hautes tours noires qui s'élèvent dans la brume artificielle de gaz d'échappements. On sent une présence forte des entreprises nord américaines, Mc Donalds, Wendy's, KFC et autres fast foods sont présents dans tous les centres commerciaux qui bordent l'avenue principale.
De fait, Panama ne serait même pas un pays à part entière si les États Unis n'avaient pas intervenu au début des années 1900 pour dissuader les Colombiens d'empêcher le Panama de s'indépendantiser. L'intervention n'était pas anodine, les Etats-Unis venaient juste de racheter le chantier du canal de Panama qui avait été commencé par les français. Ces derniers ne purent pas assumer les coûts élevés de l'entreprise et les travailleurs furent décimés par les maladies. Les Américains s'en sont chargés avec plaisir pour ouvrir le canal et contrôler ainsi les flux maritimes entre les deux océans. Plus de 22 000 travailleurs perdirent la vie dans ce chantier...mais l'opportunité financière était conséquente. Les Etats-Unis en garderont le contrôle total jusqu'en 1977 en y installant une base militaire puis il partageront les commandes avec le gouvernement panaméen jusqu'en 1999 où ils céderont finalement face au demandes du Panama, pressé de pouvoir encaisser la totalité des revenus qui s'élèvent chaque année au environs de 2 milliards de dollars.
Ainsi, nous trouvons des traces de l'empire américain un peu partout dans la société Panaméenne. En stop nous parvenons dans un quartier riche de la ville qui n'est rien d'autre que l'ancienne zone américaine. On se croirait à Beverly Hills, grosses maisons avec pelouse bien tondues, SUV dans les garages, pas un chat dans les rues...de hautes barrières de protection...pas de trottoir pour éviter les rôdeurs inconnus. Surréaliste, ceux qui vivent ici sont pour la plupart des américains qui travaillent encore pour le canal où ont pris leur retraite. Nous profitons de ce luxe et nous faisons inviter par deux restaurants à sushis puis nous suivons notre route à la recherche de la maison de Benny, un ami du réseau CouchSurfing qui vit dans une maison de bois près du parc et nous fait l'honneur de nous recevoir. Merci à Couchsurfing, LE réseau internet par excellence pour se connecter à d'autres personnes tout autour du globe.
Benny est génial, il nous accueille avec un grand et honnête rire. Il est impressionné par notre voyage et il est plus qu'heureux de partager sa maison avec nous. Pas de lit, juste quelques planches de bois...idéal pour le dos et les lever tôt! Nous passons 5 jours à Panama City pour se reposer un peu, profiter d'internet et découvrir le vieux centre. Ici aussi, il y a un "casco viejo" qui a été construit par les français à la fin du 20eme siècle...la différence avec le centre de Carthagène est frappante. Les maisons sont en ruines...à l'abandon...une ville fantôme où seules quelques âmes s'aventurent le jour. Nous comprenons très vite que la ville est en plein transformation. Les investisseurs ont racheté les maisons du vieux centre pour les réhabilités et convertir l'endroit en un centre touristique de haute gamme. Ils ont évacués à coup de dollars sanglants les couches populaires qui vivaient dans cette zone. Maintenant les prix montent et il n'y a que les plus riches qui peuvent se permettre de racheter ces immeubles...et les spéculateurs. Résultat, une ambiance de cimetière, les rues sont vides, pas d'animation...les gens de ces quartiers ont été renvoyés dans les bas quartiers populaires dits dangereux qui entourent le vieux centre. En face, de l'autre côté de la baie, les hautes tours du "business center" s'élèvent noires dans le ciel...on se croirait à Miami. Les contrastes sont frappants et clairs. Les restaurants de luxe qui se sont installés dans le vieux centre ne sont visités que par les riches négociants qui viennent en taxi pour éviter les zones à risques. Les pauvres sont mis à l'écart et les riches s'enrichissent grâce au Canal. Un tourisme peu équitable est en train de se construire sur les épaules des masses populaires de la ville. Nous en profitons toutefois pas mal, recyclant dans les restaurants à haut standing et s'impreignant un peu du contraste qui règne aux abords du centre. Là, les rues sont pleines à craquer avec pas mal de gens qui dorment dans les rues, beaucoup d'alcooliques...L'ambiance est définitivement étrange. Nous trouvons une école qui accepte de nous recevoir pour que nous puissions partager notre aventure avec les élèves. Ils ont entre 11 et 15 ans et sont très intéressés par notre histoire et nous assaillent de questions.
Au sixième jour, reposés et prêt pour l'aventure nous répéter nous même pour pouvoir profiter un jour de plus du Panama. Nous nous arrêtons à la plage malgré le ciel gris et en profitons pour nous baigner...là aussi l'ambiance n'est pas au beau fixe...pas de touristes et les voyageurs sans argent ne sont pas les bienvenus. Nous parvenons à retourner dans la ville la plus proche alors qu'une lourde pluie s'abat sur le pays. On s'arrête dans un supermarchés où l'on peut trouver de tout...des Chinois s'en occupent bien entendu. Comme partout en Amérique Latine, les chinois se sont installés dans chaque village et ont pris le monopole des supermarchés et restaurants pas chers. Le patron ne parle même pas espagnol mais nous parvenons à convaincre sa fille de nous offrir un peu de pain que nous dégustons avec de la coco trouvée sur la plage. Il y a plusieurs hommes en sérieux états d'ébriété autour de nous qui essayent de rentrer en contact avec les filles...ils viennent de recevoir leurs payes et il semble qu'ils aient prévu d'en utiliser une bonne partie ce soir! Un allemand qui travaille dans la région nous sauve en nous emmenant chez les pompiers qui nous accueillent avec plaisir. Le lendemain nous prenons la route pour s'aventurer au Costa Rica...nous n'aurons pas pris le temps de connaître Panama en profondeur mais le destin nous appelle...
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